Dans le cadre d’une masterclass pour nos apprentis sur le thème des ressources humaines en restauration, nous sommes allés à la rencontre de Benjamin Cohen, le fondateur de Dalia Group, basé à Paris.
Dans le 11ème arrondissement de Paris, à 5 minutes du Cimetière du Père Lachaise, on y trouve Jolia, un restaurant à la décoration sobre, chaleureuse et avec une carte aux inspirations du Moyen-Orient. C’est ici qu’on a pu échanger avec Benjamin sur différents sujets liés aux ressources humaines et apprendre comment fait Dalia Group pour appliquer un management plus juste et transparent.
Il nous explique que le constat est clair, la plupart des problèmes rencontrés sont liés aux ressources humaines, il est donc primordial d’adopter des mesures pour y remédier.
Le système adopté chez Dalia est plutôt simple : chacun gère son volume horaire grâce à un système de badgeuse / pointeuse. C’est un système qui peut paraître sévère à première vue mais primordial dans un secteur comme la restauration, où les horaires ne sont jamais parfaitement respectés.
Ce système fonctionne très bien ici et les avantages sont nombreux nous explique Benjamin.
Premièrement, les contrats sont respectés. Si la personne est engagée pour un contrat de 39 heures alors elle fera ses 39 heures. C’est une façon de s’assurer que tout le monde travaille avec équité et qu’aucun n’endosse des heures en plus par rapport à un autre (selon son contrat). Cette approche favorise un environnement de travail plus harmonieux en réduisant les ressentiments liés aux disparités de temps de travail. La cohésion au sein de l'équipe peut être renforcée.
Deuxièmement, les heures supplémentaires sont comptabilisées. Cela peut paraître anodin mais rare sont les heures supplémentaires réellement comptées dans la restauration. Ce genre d’action permet donc de rémunérer ces "périodes" d'extras ou bien de les compenser avec des récupérations en temps de repos. En instaurant une culture de reconnaissance du travail supplémentaire, cette démarche contribue à valoriser l'engagement de chacun et à promouvoir un climat de confiance.
Grâce à ça, les deux parties peuvent respecter leur accord qui est pourtant simple : travailler aux heures prévues et être payé pour le travail fourni.
Benjamin insiste sur ce point, le but n’est pas de "fliquer" mais de s’assurer tout soit réglo. Il est donc important que cette mesure vienne avec une démarche de confiance et de bienveillance vis-à-vis des uns et des autres.
À noter qu’il existe d’autres méthodes pour ce genre de suivi comme des tableaux ou même en se basant uniquement sur la confiance mais sans garantie de répondre aux problèmes évoqués.
Après avoir lancé le sujet des congés payés, un ressenti commun s'en dégage : celui d'un "tabou" d'en demander... Pour cause, ce sentiment de gêne de perturber l'organisation en cas d'absence, de peur de déranger ou bien même de contrarier les collègues ou supérieurs. Nos apprenants débattent.
Ce qui en ressort est unanime : "Ça paraît fou de demander des congés, comme si nous n'avions pas le droit !"
Le problème, indique Benjamin, c'est qu'un cercle vicieux peut aussi avoir tendance à s'installer : personne ne part en vacances car.. personne ne part en vacances...
L'idéal serait de partir du principe que les congés seront acceptés, sauf si la période ne s'y prête pas. Ce à quoi il faudrait alors trouver une solution pour combler cette absence. Cependant, ce n'est pas toujours si simple...
Benjamin nous explique que chez Dalia, un délai minimal est mis en place pour demander des congés. Cela permet aux managers d'anticiper les plannings et de s'organiser de sorte à ce que chacun puisse prendre ses congés, quand il ou elle le veut.
Il ajoute qu'évidemment, il peut arriver que des congés soient refuser. C'est rare mais frustrant de devoir le faire lorsqu'il n'y a pas d'autre solution.
La conclusion à cela est qu'il faudrait aborder ces sujets de manière ouverte et constructive afin de rompre avec ce tabou persistant. Que ce soit en matière de congés, de rémunération, d'heures de travail ou tout autre aspect du monde professionnel, il est essentiel d'encourager des discussions franches et transparentes. Cela favorise un environnement où chacun se sent à l'aise pour exprimer ses besoins et ses préoccupations, contribuant ainsi à une meilleure compréhension mutuelle et à des relations de travail plus saines.
Le salaire dépend évidemment de l’établissement mais la politique qui y est appliquée est propre à chacun, notamment en matière de négociation de salaire.
Chez Dalia, il y a zéro négociation possible. Cela peut une nouvelle fois paraître "strict" mais non sans avantages. Au travers d’une grille qui est connue de tous - dès le recrutement - les salaires sont annoncés en fonction du type de poste. Ce système permet de n'avoir aucune tension dans l’équipe au sujet des prétentions salariales mais également aucune gêne au recrutement.
C'est tout à fait normal d’essayer de négocier son salaire nous indique Benjamin mais cela a pour but d’éviter toute injustice. Il est tout de même important de préciser que le salaire peut naturellement augmenter selon l’ancienneté de la personne.
Il existe deux échelons de salaire par poste qui dépendent de l’ancienneté et de l’expérience du salarié. Chez Dalia Group, le meilleur moyen d’avoir une évolution salariale est d’avoir une évolution de poste. C’est la raison pour laquelle la promotion interne y est grandement favorisée
Autre aspect positif (et naturel), cette grille est paritaire. Cela permet de maintenir une égalité hommes-femmes. Évidemment, cet aspect devrait être la norme et ne devrait pas à être souligné mais la réalité est tout autre... C’est pourquoi, il est important d’instaurer des mesures pour garantir une égalité des genres.
L’aspect négatif de cette grille salariale est avant tout la perte de super candidats pour l’employeur car s’il ou elle n’est pas d’accord avec et souhaite négocier, Dalia sera contre. Il n’y a aucun cas par cas. Il s’agit donc d’une mesure à double tranchant car il faut s’y tenir pour être cohérent dans sa démarche. Chez Dalia Group, à poste égal, tous les salaires sont similaires.
Pour ce qui est des postes de cadres (chefs, sous-chefs...) cette mesure ne s’applique pas car d’autres critères sont à prendre en compte comme la taille du restaurant, la charge de travail, le chiffre d’affaires généré etc. Il y a plus de responsabilités pour un cadre.
Benjamin nous explique que ces mesures ne sont globalement pas parfaites, il en est conscient. Il y a également des axes d’améliorations mais cela permet d’instaurer une certaine équité et de la transparence dans la politique RH du groupe, ce qui est rarement le cas en restauration.
Nous sensibilisons les cuisiniers de demain sur des sujets encore trop peu abordés alors qu'ils sont très importants pour le bon fonctionnement d'un restaurant. En tant qu'organisme de formation, notre mission est de leur donner les clés en main pour les aider à monter leur projet professionnel, si l'envie leur prend et adopter les bons comportements au sein/à la tête d'une équipe. On espère, ainsi, contribuer et parvenir à changer les mentalités managériales et rendre ce secteur plus humain dans ses engagements.
En organisant ce type d'intervention - comme celle de Benjamin - auprès de nos apprenants, nous souhaitons leur transmettre et partager une vision de la restauration plus respectueuse et bienveillante envers l'humain. peuvent également être éclairés sur ce qui ressemble à un management plus transparent. Leur démontrer, grâce à des témoignages et des retours d'expériences, ce qui fonctionne ou non et ainsi, espérer qu'ils en tireront le meilleur enseignement pour l'appliquer à la suite de leur passage à La Source.
Par ailleurs, ces échanges sur les ressources humaines sont aussi des indicateurs pour que nos apprenants puissent évaluer eux-mêmes dans leur stage ou leur alternance, les conditions de travail qui sont acceptables ou non, et nous les faire remonter. Ces retours nous permettent de solidifier notre communauté de partenaires restaurateurs engagés.